
* Ce que nous sommes * Caroline BONGRAND
Écrire le vide pour le remplir. Et l’accueillir. Un roman inspirant et lumineux.
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Il n’y a pas d’évidence. Aucune. Jamais. A commencer par celle selon laquelle nous disposerions tous de racines bien ancrées, de mémoires familiales bien établies, d’un héritage humain bien défini.
Il est en effet de ces arbres généalogiques qui comportent une multitude de branches vides, ou bien à moitié en pousse, à moins qu’elles ne soient totalement absentes ? Et pourtant le besoin de les voir se dévoiler grandit intérieurement et un jour explose. Au point de ne plus pouvoir repousser ce moment de coucher son histoire sur le papier. Parce que la nature n’aime pas le vide et que c’est une façon de le remplir.
L’auteure, Caroline LEGRAND, qui est aussi la narratrice, se jette dans cette issue suite à un évènement bouleversant. Peut-être même plusieurs. Et non sans considération sur le fait qu’écrire sur soi, c’est aussi écrire sur les autres. Pourtant. La pudeur et l’honnêteté de sa démarche savent nous emmener dans cette quête qui peut faire échos à certains pans de nos propres blessures familiales. Tous ces petits mouchoirs transmis entre générations et toutes ces incertitudes dans les détails des récits des Autres.
Cette histoire d’amour, était-ce « un grand ou un petit amour » ? Quelle place occupe le romanesque dans tout cela, le nom de famille, les femmes, la maison, l’amour des autres et finalement l’amour de soi ? Autant d’interrogations qui se dessinent, sans jugement. Traduisant simplement cette envie de trouver sa réponse du moment. Et de découvrir « ce que nous sommes ». A la rencontre entre le verbe être et la notion d’addition.
L’écriture alterne entre poésie des sentiments et rudesse des violences découvertes, entre passé et présent à la lumière de la grande et de la petite histoire, entre questionnements dévorants et acceptation de réponses incomplètes. Le rythme les suit, tantôt lent et tantôt abrupt. Pas de phrase inutile, chaque mot est pesé, la page parfois presque blanche assumée. La présence de nombreux personnages et le tumulte de leurs vies parallèles peuvent certes nous perdre un temps. Mais le fil est là, nous rattrape et nous guide entre passé et présent.
Je range donc ce roman parmi les découvertes lumineuses et j’encourage chaque lecteur et lectrice passionné(e) à sa lecture et à son partage. Car au-delà de ce thème relatif aux secrets et vides de famille si chers à de nombreux écrivains, le parti pris de l’auteure de romancer volontairement certaines absences de l’histoire et de l’annoncer en amont, donne aussi une place à part à ce livre dans la catégorie des autobiographies. Au-delà, il est un joli chemin dont on peut s’inspirer pour l’emprunter au quotidien. Pour chacune et chacun de nous. Une autre façon d’aller à la rencontre de soi, de s’apaiser et de transmettre ensuite. Car oui, il est naturellement beaucoup question de transmission, d’accueil et d’imagination. Et la résonance est bien forte à ce jeu-là.
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